Quel est le mot le plus prononcé dans l’actualité depuis plus de 48 soirs? Manifestation. Carré rouge, carré vert, carré blanc, casseroles, manifestants nus, le Québec vit à l’heure des manifestations. A-t-on autant manifesté? De façon régulière et avec originalité?
Certains évoquent même Gandhi ou Martin Luther King.
Avant les carrés étudiants et les casseroles, il y a eu les « indignés » de Wall Street fiasant sortir d’autres indignés à Montréal et à Québec, collés serrés sous des bâches les protégeant de la pluie et de la neige.
Et qui disait que les Québécois se vautraient dans le « confort et l’indifférence »? On n’a plus rien à envier aux Français que l’on regardait sortir dans la rue en les trouvant très passionnés…mais leur enviant leur solidarité, leur solidité et leur nombre.
Les Québécois démontrent leur engagement. Ils sortent de chez-eux, fabriquent des pancartes, y vont de slogans parfois très originaux et nous font découvrir une jeunesse engagée, articulée, défendant ses idéaux, malgré les commentaires désapprobateurs.
Mais pourquoi, tout à coup, manifeste-t-on autant ? On pourrait évoquer des raisons politiques, sociales, économiques, générationnelles. Et si on parlait du besoin? On ne peut pas dire que les manifestations regroupent toujours une grande majorité d’intervenants, que ce soit d’une idéologie ou de l’autre, on a même vu des manifestations de casseroles où il n’y avait que l’équivalent d’une seule batterie sortie de l’armoire. L’unanimité n’y est pas. Un peu comme en marketing, il y a « fragmentation du marché ».
Sauf qu’au-delà du nombre de personnes, de l’idéologie, des raisons pour lesquelles on manifeste, il y a un besoin. Le besoin d’agir. Le besoin de cesser d’être silencieux et de sortir, de se faire voir. De dire haut et fort que l’on n’est pas d’accord, que l’on est indigné, que l’on dénonce.
En fait, l’engagement est en train de devenir une nouvelle dimension de la vie privée. Les motivations sont davantage morales que politiques. On accepte de moins en moins le clivage de plus en plus grand entre riches et pauvres. Non seulement on est choqué mais on ressent le besoin de le montrer sur la place publique. Dénoncer égale s’impliquer. Ne plus être indifférent. Ne plus rester dans son salon.
Manifester est certainement une démonstration de la bonne santé mentale des Québécois. C’est rassurant.